En vertu de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 (article 13), toute personne nommée ou désignée dans un article bénéficie d’un droit de réponse dans les trois mois suivant la parution. Cité à de nombreuses reprises ces derniers jours, à l’occasion d’un sondage sur la foi des Français, Dieu (le père) nous a fait parvenir son point de vue par les voies aériennes. C’est une exclusivité Les Inrocks, mais Dieu étant partout, on ne sait pas trop.
Mes chers concitoyens,
A l’image de l’homme, le Tout-Puissant ne saurait rester les bras ballants devant la calomnie. Exceptionnellement, j’ai décidé de sortir de ma céleste réserve. Dimanche matin, comme tous les dimanche matins, j’ouvre Le Parisien / Aujourd’hui en France. “36% des Français croient en Dieu”, m’apprend un sondage Harris Interactive. Tabernacle, hurlai-je, faisant déguerpir un angelot assoupi. “KESKIA?” me crie Marie depuis la cuisine – nous entretenons une relation assez traditionnelle.
Moins de quatre Français sur dix croient en moi. Au début j’étais furax. Je ne peux pas m’occuper de tout sur Terre, mais je vous assure que si je ne gérais rien ça serait pire. Ensuite, Gabriel m’a fait remarquer que ma cote de popularité restait supérieure à celle de Nicolas Sarkozy (24%) et François Fillon (34%). Soit, mais l’écart se resserre. Et surtout, la distribution des réponses par catégories socio-professionnelles laisse présager une certaine déconnexion de mon électorat.
Selon ce sondage, je remporte les meilleurs scores dans les catégories professionnelles les plus aisées, ce qui fait de moi le Dieu des riches. Cet état de fait me pose un petit souci moral. Certes, je ne descends pas souvent visiter mes ouailles en circonscription, mon temps bien qu’éternel est précieux. Mais comme l’a écrit Luc : “Heureux, vous les pauvres : le royaume de Dieu est à vous ! Heureux, vous qui avez faim maintenant : vous serez rassasiés ! Heureux, vous qui pleurez maintenant : vous rirez !”
Je tiens à réaffirmer mon entière solidarité à l’égard des propos de mon collaborateur. Oui, je suis et je resterai le Dieu du pouvoir d’achat, le Dieu de la solidarité, le Dieu du care. N’en déplaise à mes détracteurs qui, sans cesse, sortent mes propos de leur contexte. Chers athées, chères brebis égarées, vous vous êtes laissés manipuler. J’existe, plus que jamais, et je crie le message d’amour universel dans vos petites oreilles bornées.
Paix sur la Terre aux hommes de bonne volonté,
D.
PS : Comme je ne me manifeste que rarement, j’en profite pour vous conseiller l’excellent film de Xavier Beauvois, Des hommes et des Dieux, dans lequel je fais une apparition.
Photo : stuartpilbrow / Flickr